Ezekiel Naym

« Papa ! Non ! Arrête de me frapper, lâche –moi, vas-t-en. »

L’enfant continuait d’hurler des ordres, sentant des ondes passer de lui à son père. Mais non, un bouclier le repoussait. Comme si un bélier fonçait sur une porte de château voulant la briser, il faisait en sorte d’entrer dans son esprit. Mais ne sachant pas contrôler ce don, ce fardeau, ce pouvoir, cette malédiction (il ne savait pas comment l’appeler.) Il ne savait pas arrêter les coups qui se répétaient. Il ne savait pas comment calmer son père. Son pouvoir ne marchait plus. Mais alors pourquoi sur Adriel avait-il marché ? Pourquoi avait-il marché seulement pour faire cette bêtise ? Ou plutôt ce meurtre ? Il ne comprenait pas. Il ne comprenait plus. L’enfant finit par cacher son visage avec ses bras, se recroquevillant en fœtus. Mais les coups redoublaient de force. Il hurla, pleura. Mais il n’y avait rien à faire.

Soudain, il se coupa le flanc avec un bout de verre trainant sur le sol, sans doute venant d’un des nombreuses assiettes que son père lui brisait sur le visage ou le corps. Quand son père se pencha vers lui, se mit à califourchon sur lui, il cramponna le bout de verre. Au moment où celui-ci frappa sur lui, il ne se contrôla plus. La peur mêlé à la défense multiplia sa vivacité ainsi que sa force. Ainsi, il trancha, fermant les yeux. Un liquide poisseux tomba sur ses commissures de lèvres et il ouvrit les yeux. Ce qu’il vit le pétrifia de terreur et il lâcha brutalement le bout de verre. Du sang coulait de la gorge de son père abondamment. Il n’avait pas tranché très loin mais il avait visé la jugulaire. Soudain le corps de son paternel tomba alors sur lui et il hurla. Il le poussa brutalement et recula, en position assise, jusqu’au pied de la table. En sentant cette sensation, il hurla à nouveau, se leva, tituba et courut dans le jardin.

Il courait comme un animal sauvage. Il revoyait le corps de son père sur lui, le sang coulant sur son cou. Il revoyait le corps d’Adriel dans l’eau, sur la rive sans vie. Il avait tué. Par défense mais aussi d’une parole. Comment avait-il pu tuer son petit frère, en lui demandant seulement de jouer dans l’eau ? Il ne l’avait pas touché. Il ne comprenait vraiment pas. Jamais l’Enfant n’avait ressentit la peur, mais ce jour-là, il la ressentait réellement. Il avait le sentiment d’être suivi par des spectres chaque pas qu’il faisait, il avait cette impression que les arbres le fixaient avec haine. Finalement, il tomba à genoux. Depuis combien de temps courait-il ? Il n’en savait rien. Il savait simplement que ses genoux n’en pouvaient plus et qu’il ne pouvait plus se relever. Il finit alors par se coucher sur le flanc à nouveau, à même le sol de la forêt, et ferma les yeux.

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Brutalement, il ouvrit les yeux. Quelqu’un le secouait. Son canif ouvert se retrouva brutalement pointé vers « l’agresseur ». Il ne savait pas depuis combien de temps il dormait dans cet endroit, tout ce qu’il savait c’est qu’il ne connaissait pas la personne le touchant. Alors autant se défendre rapidement. Seulement, un cliquetis et un canon se dressa dans son chemin, se mettant sur son front. Alors l’Enfant posa son canif sur le sol, en reculant doucement : son père lui avait parlé, durant ses moments de gentillesse, des assassins. Peut-être que cet homme en est un. Alors il préféra poser son canif pour être peut-être à l’abri d’un éventuel meurtre. L’homme rangea alors son pistolet et adressa un tendre sourire à l’enfant, en lui tendant la main. Celui-ci hésita quelques secondes pour finalement prendre la main du plus vieux et se relever. Ses jambes tremblèrent légèrement mais il réussit à rester debout.

« Dis-moi petit. Quel est ton nom ?
- Ezekiel.
- Et tu viens d’où ?
- Ca ne vous regarde pas. »

L’homme eut alors un rire à la réponse d’Ezekiel tout en hochant la tête. Cet enfant avait une bonne répartie et une sacré paranoïa. C’était parfait. C’était Cet enfant qu’il recherchait. Il ferait un parfait pion, un parfait partenaire, quand il serait plus grand. Mais bon, tout ceci ne peut arriver sans faire connaissance, n’est-ce pas ? C’est pourquoi une longue discussion entre les deux protagonistes débuta. Cela dura plusieurs heures mais ni l’enfant, ni l’homme ne se rendirent compte du temps qui passait. Ils faisaient connaissance. L’un était chasseur et l’autre était orphelin. Ils avaient tout pour bien s’entendre, c’est connu. Puis, l’homme observa Ezekiel. Cela faisait maintenant plusieurs minutes qu’il triturait le bout de sa chemise, en baissant la tête et son menton tressautait. Il était prêt à pleurer. Mais pourquoi ?

« Dites Monsieur ? Je peux vous confier un secret.
-Bien sûr mon petit.
-Je crois que j’ai fait une grosse bêtise …
-Laquelle ?
-J’ai blessé Papa au cou et il ne bougeait plus toute à l’heure … Puis j’ai dit à Adriel de plonger et il flottait sur l’eau après … »

Un sourire étrange apparut brutalement sur les lèvres de l’homme, tandis que celui-ci prenait l’enfant dans ses bras. Il lui fit un câlin et l’Enfant pleura. Il avait besoin de cela, il le savait.

« Ne t’en fais pas, tout ira bien. »

Il était véritablement l’Enfant qu’il recherchait.

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15 ans sont passés dorénavant. Il avait très vite comprit qui était réellement ce Sauveur. Oui bon, avouons-le, il lui avait fallut plusieurs années. Mais bizarrement, même en sachant cela jamais il ne changera d’avis sur cet Homme. Il était son sauveur, il l’avait élevé, éduqué – peut-être pas de la bonne manière mais il l’avait fait- et il l’avait rendu fort. Son adolescence s’était parfaitement bien passée auprès d’Anyel.

Durant celle-ci, il avait découvert plusieurs choses. Il avait découvert son don, avait apprit à le maitriser, à pouvoir facilement manipuler quelqu’un. Bon bien sûr, il y a des failles à celui-ci : la personne doit avoir vécu beaucoup de souffrance, avoir un esprit affaibli par le deuil ou autre chose. Car un esprit d’une personne adulte étant forte mentalement ne subira aucune maltraitance ou ordre de la part d’Ezekiel. Mais il avait aussi apprit à maitriser correctement des armes. Comme un poignard.

Bien sûr, il sait parfaitement que les assassins sont commandés par le Shat’se. Voilà, pourquoi il ne tue seulement que pour l’argent. Ou seulement quand on l’agresse réellement. Il n’a pas encore la folie du meurtre, heureusement d’ailleurs. Ses meurtres sont souvent propres, discrets et concis. Un coup de couteau dans le coeur ou la jugulaire suffit.

Personne ne sait qui fait ces meurtres ressemblant à une exécution, mais ils savent tous que cet homme est dangereux. Ezekiel Naym est dangereux.

Vous l’aurez donc comprit. Ezekiel est quelqu’un de très difficile à comprendre. Les personnes ayant un lourd passé son souvent dans ce cas présent. Ils subissent des épreuves qui les rendent plus fortes, certes, mais aussi très renfermées sur elles-mêmes malheureusement. Elles deviennent froides et extrêmement impulsives.

C’était le cas de notre jeune homme brun. En effet, avec le temps il avait réussit à se calmer légèrement. Auparavant, c’était un enfant impulsif, lunatique et extrêmement violent. Il avait réussit à calmer ces trois qualificatifs. La violence ? Il l’avait gardé en lui, seulement, il avait réussit à la canaliser assez pour seulement la mettre contre ses victimes. Bien entendu, il ne faut pas trop le chercher non plus. Il peut être passif, calme mais il sait très bien se défendre, faut garder ça en tête. Le lunatisme ? Il est toujours en lui, bien évidemment, mais celui-ci s’est transformé, malheureusement, en paranoïa. Une très forte paranoïa, croyez-moi. A tel point, qu’il garde son couteau sur lui, même lorsqu’il dort. A ce moment-là, celui-ci est présent sous son oreiller. Vous le surprenez et c’est une pointe d’un poignard en acier qui se retrouve au niveau de votre jugulaire. Il ne vous tuera pas, mais il vous menacera très franchement. Son impulsion ? Il l’a gardé. C’est pourquoi, il faut faire très attention durant ses crises de colère. Il ne faut absolument pas le provoquer sinon il pourrait très bien vous inciter à faire quelque chose grâce à son don par pure colère.

Oh bien sûr, n’allez pas croire que ce jeune homme est un monstre sans cœur. Nullement. Il est seulement un Homme recherchant la vérité et la conscience de soi. Il cherche à protéger son cœur d’une éventuelle nouvelle attaque de ses émotions. Il ne s’attache à personne, ne fait confiance à personne, car il sait qu’on est bien mieux seul que mal accompagné. Cependant, quand il arrive à s’attacher, si jamais vous arrivez à pénétrer dans son cœur, vous découvrirez un Ezekiel totalement différent : il sera doux, calme, gentil et superprotecteur.